Les 12 travaux de Simba

Publié le par abou.nizar

Simba leva ses yeux de miel, vers le ciel bleu en fronçant les sourcils ...

Le soleil de plomb, faisait briller une sueur blanchâtre sur son front ridé, qu'il essuya du revers de sa chemise bleu.

Accoudé à sa pioche, il regardait la terre, désespérément aride, qui s'étendait devant lui jusqu'à la mer. Soudain ses yeux brillèrent à nouveau et il se remit au travail ...

La pioche, tapait contre le sol dur comme le marbre ... Des fois, un gros cailloux s'effritait en mille et une étincelle, d'autres, la pioche s'enfonçait dans une terre poudreuse et Simba n'en perdait guère son obstination ...

Derrière lui, des hectares labourés grillaient sous la canicule automnale, mais Simba ne les regardait jamais ... Ses yeux pointaient l'horizon interminable et ne se souciaient guère de ses mains qui ruisselaient d'un sang rouge vif.

Sur un talus qui surplombait la baie ... un homme étrange scrutait la dure labeur de Simba ... Vêtu de noir, malgré la chaleur suffocante, il se tenait là assis sur une chaise pliante, sous un parasol noir ... De temps à autre il prenait quelques gorgées dans une bouteille drapée de vieux journaux humides, mais il ne perdait jamais Simba des yeux ...

Quand le soleil commençait à se laisser disparaître derrière l'horizon ... Simba posa sa pioche, ôta sa chemise pour s'essuyer, respira un bon coup et se laissa s'asseoir à même le sol ...

Derrière lui, une silhouette drapée, dandinait à travers les rainures dessinées par sa pioche ... C'était Fatima sa femme qui lui apportait son maigre dîner ...

Elle s'assit alors à ses côtés en regardant d'un air fier et amoureux ses formes sculptées par les coups de pioche ... ensuite ils dînèrent tous les deux sans dire un mot ...

Avant de partir Fatima, lui lança un appel désespéré : "Tu rentres ce soir ?"

- "Non Fatima ... Je ne rentrerais pas avant la prochaine pluie !", répondit calmement Simba.

Fatima ramassa alors les quelques affaires qu'elle avait ramenées et reprît le chemin du retour ...

A peine avait-elle disparu dans la pénombre que l'étrange curieux vêtu de noir, se présenta devant Simba :

- "Bonsoir Simba ! Mon patron t'offre 1000$ de plus , comme convenu ! Alors qu'est-ce que tu en dis ?"

- "Bonsoir, Raoul ... Dis à ton maître que mes terres ne sont pas à vendre ... comme convenu !", répondit Simba avec un calme exemplaire ...

Raoul tourna les talons et disparût à son tour dans la pénombre ...

C'est alors que l'appel à la prière déchira la cape du silence religieux qui régnait ... et Simba se leva pour l'exaucer ...

 

***

 

Le jour se leva enfin et Simba était déjà au travail ... Raoul aussi était là, perché sur son talus ... toujours vêtu de noir ... toujours sous son parasol noir ... toujours entrain d'épier ses faits et gestes.

Simba a travaillé tellement dur, ces derniers jours, qu'il avait battu ses propres records. La brise fraîche du matin annonçait les pluies bienfaisantes de l'automne et il était bien heureux d'avoir presque fini !

Dure était la loi de la nature, sur sa terre natale. Les pluies étaient tellement capricieuses qu'il ne fallait pas les attendre pour labourer les champs arides et durs comme du béton.

De ces champs, jadis la fierté de ses ancêtres, il ne restait que le sien, le reste ayant été vendu par ses cousins et parents lointains à M. Blum, un richard étranger, aussi étrange que son serviteur Raoul.

Depuis ce dernier n'arrête pas de harceler Simba pour obtenir ces terres et chaque jour il augmentait son offre de 1000$ ...

Cependant Simba ne vendrait jamais ; même pour tout l'or du monde il ne laisserait le fanion portant les deux triangles entrelacés de la famille Blum, flotter sur la terre de son enfance.

Le soir venu, Simba croulant de fatigue, s'assit en attendant la visite quotidienne de Fatima suivie de celle de Raoul ... mais ce soir là, le destin lui cachait une bien mauvaise nouvelle ...

- " Simba ! Je suis dans l'obligation de vous chasser de cette terre !", s'écria la petite voix du maire du village, qui se tenait juste derrière lui ...

- " M. Blum a fait valoir ces droits en tant que propriétaire de ces terres, en présentant un acte de vente signé par votre père, il y a une quinzaine d'années ...

Et je suis désolé de te dire que cet acte est bel et bien en règle ...", poursuit-t-il en lui tendant un bout de papier chiffonné

Simba saisit le document avec vigueur, et après l'avoir plusieurs fois lu et relu ... il regarda longuement le maire avant de lancer le plus grand hurlement de désespoir que l'humanité avait jamais entendu.

 

***

 

Simba était assis là, sur le talus qui surplombait ses terres perdues.

Il était vêtu de noir malgré la chaleur suffocante, sans parasol et sans bouteille drapée par des journaux humides pour calmer sa soif ...

Il scrutait tous les faits et gestes de Raoul qui dirigeait les immenses machines qui piétinaient un sol irrigué par sa sueur ...

Il s'est fait avoir !

Blum l'avait laissé labourer ces terres pour son compte, en lui miroitant un millier de $ en plus tous les jours ... Il avait attendu qu'il finisse la sale besogne avant de montrer ce bout de papier, qui faisait de l'héritage de Simba, le sien.

Simba ne comprenait pas les raisons qui avaient poussé son père à cacher cette histoire de vente ... Il ne savait pas non plus où son père avait bien pu cacher, l'or de Blum : le prix auquel il aurait vendu son âme ... Il avait tellement labouré cette terre, qu'il en connaissait tous les recoins, et si son père y avait enterré quoique ce soit, Simba l'aurait tout de suite vu ...

Beaucoup de questions restaient sans réponses et cela ne faisait qu'accroître la torture de Simba ...

Soudain, un vieux souvenir remonta des catacombes de sa mémoire. C'était le jour de la mort de son père, quand il réunit toute la famille, autour de son chevet ... Il se rappelait alors que son père s'était lancé dans un discours interminable, sur la valeur de la terre ... Un discours qui n'était pas nouveau pour Simba mais qui faisait quand même rire ses cousins, et qui s'achevait pas une phrase, alors dénudée de tout sens : " Simba, mon fils promet-moi de veiller sur la plage qui longe nos terres ... elle saura te dévoiler de précieux trésors ..!"

Et Simba sursauta ! Il savait où son père avait pu cacher les pièces d'or. Et il courût vers la plage, comme jamais il n'avait couru ...

 

***

 

Simba se tenait sur la plage. Il regardait cette étendue bleue-azur qui s'offrait à ses yeux et savourait pleinement la sérénité dont elle inondait son cœur.

A quelques mètres de la plage, flottait une petite embarcation au gré des vaguelettes.

Un petit homme au visage brûlé par le sel, se tenait debout par-dessus bord. Il tirait un filet qui semblait tellement lourd ...

- " Kouni .. Kouuuuuuuuuuuniiiiiii !", hurlait Simba en s'avançant vers lui.

- " Salut grand Simba !", s'écria le vieux Kouni dans une joie méditerranéenne.

- "J'ai appris pour Blum ...", continua-t-il , en rabaissant la tête, l'air moins jovial ...

- " Oh ! t'en fais pas pour moi brave Kouni !", commenta Simba en rajoutant :

- " Cette ordure me le paiera un jour !".

- " De toute façon, il y aura toujours une place pour toi, sur mon voilier !", lança Kouni, en tapant du pied sur le fond de sa barque délabrée ...

Simba sourit brièvement avant de continuer :

- " Dis Kouni ... j'ai décidé d'entreprendre un projet très important et très rentable ... et j'ai besoin d'un associé qui connaîtrait très bien cette partie de la côte ... est-ce que cela t'intéresse ..?"

- " Un projet ? Ici, dans ce trou à rat ..!?", rétorqua le vieux pêcheur, avec ironie, en remontant ses filets vides.

- " Oui, ici et peut être bien là où tu jetteras tes filets, Kouni !"

- " Et de quel genre de projet, s'agit-il ?"

- " D'une chasse au trésor Kouni ! Un trésor en pièces d'or !"

Le vieux marin lâcha les filets qu'il s'apprêtait à rejeter et s'assit brusquement sur le rebord de la barque, en balbutiant :

- " Un trésor ... sur ma plage ...! "

- " Oui !", confirma Simba en hochant la tête, avant de reprendre avec conviction...

- " Et il y en aura assez pour que nous nous la coulions douce, pour le restant de nos jours ... et pour que je reprenne de la terre au village !"

 

***

 

Sur une dune qui surplombait la plage ... Raoul scrutait la dure labeur de Simba ... Vêtu de noir, malgré la chaleur suffoquer, il se tenait là assis sur une chaise pliante, sous un parasol noir ... De temps à autre il prenait quelques gorgées dans une bouteille drapée de vieux journaux humides, mais il ne perdait jamais Simba des yeux ...

Onze mois se sont écoulés et Simba cherchait encore le présumé trésor enterré quelque part au large de cette plage. Son ami et associé Kouni ne ménageait aucun effort pour l'aider et ils repartaient tous les soirs avec juste assez de poissons pour nourrir leurs familles ...

Raoul, quant à lui était toujours fidèle au rendez-vous ... il épiait les faits et gestes de Simba et ne s'absentait que quelques minutes par jour, le temps d'aller inspecter l'avancement des travaux sur les terres confisquées à Simba.

Simba commençait à perdre espoir en ressentant le regard perçant de Raoul lui transpercer le dos ; un dos chauffé à rouge par le sel et le soleil de plomb.

Soudain Simba entendit des cris lointains venus du large ...

Il porta sa main à son front pour se protéger de la lumière aveuglante et regarda vers l'horizon. Les cris de Kouni prenaient un sens au fur et à mesure que sa barque approchait de la plage et Simba ne pût s'empêcher de courir à son rencontre en distinguant ses phrases entre-coupées :

- " Les jarres ... le trésor ... les jarres Simba ... on est riche !"

Simba ne pouvait cacher sa joie ! Ils avaient dragué le fond de cette plage de long en large durant des mois ... et ils n'avaient jamais pensé à explorer les jarres à poulpes qui gisaient ça et là sur leur chemin.

Ces jarres servaient de nids pour les poulpes, et aujourd'hui, comme à il faisait chaque saison, Kouni les remontait pour y puiser cet animal insolite et tant convoité ; mais ce jour là la chance lui souri et une des jarres cracha toutes ses pièces en or !

Les deux associés accostèrent sur la plage avec discrétion. Simba se méfiait de Raoul et ne voulait surtout pas réveiller ses soupçons. Ils abandonnèrent la barque et ils prirent à deux la jarre pleine à craquer.

En dandinant sous le poids de l'or, ils parlaient déjà de leurs projets futurs ... une grosse ferme où Simba cultiverait des céréales et des légumes ; débouchant sur une baie où Kouni pêcherait le bon poisson du pays !

A peine ils avaient pris le chemin qui contournait la grande dune qu'ils s'arrêtèrent net devant le groupe de gendarmes qui les attendait.

Le petit maire du village s'avança vers Simba et lui dit :

- " Simba, mon vieux ! Je suis désolé de te refaire le coup. Vous avez trouvé ceci sur une propriété de M. Blum et vous n'avez pas le droit de le garder ..."

Le maire saisit avec peine la jarre des mains de Simba et la donna à l'officier qui se tenait derrière lui.

Blum apparût enfin derrière la foule et Simba se précipita sur lui en criant :

- "Voleur ! c'est l'argent de mon père !"

Ce dernier sourit et répondit sèchement :

- " C'était mon argent, et ça le restera !", avant de répliquer :

- " De toute façon, selon la loi vous avez droit à 10%, vous que vous avez contribué à le retrouver ..."

Il fît un signe de la main à Raoul qui tendit à Simba une maigre enveloppe ; Ensuite tout le monde partit, laissant Simba et Kouni plantés devant la jarre désespérément vide.

Quelques secondes plus tard, Simba ouvrit l'enveloppe et partagea grossièrement la liasse de billets en deux parts inégales. Il donna la plus grosse à Kouni et lui dit :

- " Kouni mon brave Kouni ... Je te confie Fatima, veille sur elle.", avant de partir.

Kouni reprit enfin ses esprits et se précipita vers la dune. Au loin il voyait Simba arpenter la montagne et il murmura :

- " Il est parti rejoindre les rebelles ... Que dieu le bénisse."

Quelques jours plus tard, la radio locale annonçait :

- " ... ce matin un attentat suicide a fait 20 morts dans la bande de Gaza. Le terroriste a visé la résidence de M. Blum un riche colon dont la famille s'est implantée dans la région depuis 2 générations ... L'attentat n'a pas encore été revendiqué, mais les services de sécurité ont recueilli les témoignages du secrétaire privé de la victime, miraculeusement épargné ... et un certain Simba est pointé du doigt ..."%

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